Grain de sel n°16: Perceval et Coronaviral (25)

NB: Les 5C et 5D de l’année 2019-2020 étudiaient Perceval de Chrétien de Troyes lorsque s’est déclarée l’épidémie du Coronavirus. Les cours ayant eu lieu en ligne pendant quelque temps, les deux classes se sont essayées à la rédaction collective d’une aventure inédite de Perceval. En 2020-2021, leurs successeurs de 5A et de 5D ont pris le relais de l’histoire au point où elle avait été interrompue, c’est-à-dire en pleine forêt, au bord d’une rivière périlleuse. Celle-ci a été livrée sous la forme d’un feuilleton plus ou moins régulier sur ce blog… en voici le dernier épisode, signé par leur professeur, qui devait mettre un terme à cette rédaction collective de longue haleine pour pouvoir transmettre dans les temps le texte aux illustrateurs. En effet, les Cinquièmes de l’année passée, aujourd’hui en Quatrième, doivent s’occuper d’illustrer l’histoire qu’ils ont commencé à écrire et que d’autres ont terminée à leur place. Ce travail, une fois achevé, devrait être publié dans sa totalité en fin d’année.

Pour mémoire:

– Ce sont là des paroles bien confiantes pour un simple paysan comme toi… Mais cela m’amuse… Soit, j’accepte ton défi, si toutefois tu veux bien me dire de quel défi il s’agit.

– Euh… Une course à cheval?

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Ici s’arrête la chronique de Perceval et Coronaviral… Le manuscrit s’interrompt brutalement, soit que le scribe n’ait plus eu d’encre, soit qu’il se soit endormi, soit encore qu’un tiers ait déchiré la fin du texte pour en faire des boulettes de papier, comme il arrive parfois.

Mais on raconte que Coronaviral éclata de rire. Il accepta le défi à condition que dans cette course, les chevaux n’iraient pas côte à côte dans le même sens, mais fonceraient l’un vers l’autre. Leurs cavaliers seraient munis de leur lance, de leur épée et de leur écu. Pour ce qui est du courage, aucun des deux n’en manquait !

Au premier choc la lance de Perceval glissa sur l’écu de Coronaviral, qui en profita pour lui asséner un coup terrible sur le heaume. Les chevaux firent demi tour pour s’élancer à nouveau, et au second choc, les deux lances se brisèrent simultanément, volant en éclats (L’un de ces éclats vint érafler la pommette gauche de Léodagan, qui en garda toute sa vie une cicatrice : il fut surnommé le Balafré et prétendit qu’il avait reçu cette blessure de la griffe d’un dragon qu’il avait vaillamment combattu pour délivrer une jeune fille prisonnière…)

Il n’y eut pas de troisième choc car, n’ayant plus de lance, les deux ennemis avaient mis pied à terre. Mais le géant au heaume écarlate fut déséquilibré et s’étala sur le sol, où le retint le poids de son armure. Perceval n’eut plus qu’à lui arracher, comme il est d’usage, l’aveu de sa défaite.

Lors du procès qui eut lieu en grande pompe, on apprit que Coronaviral et ses sbires avaient médité d’annexer les terres du village et de toute la contrée en se débarrassant purement et simplement de leurs habitants. C’est pourquoi ils avaient empoisonné les puits et les rivières. Mais ils avaient eu pour cela besoin de la connivence du grand échevin, lequel en échange de la promesse d’ailleurs peu fiable d’être fait sous-duc, avait accepté de trahir son peuple. Telle est la puissance de l’attrait des honneurs sur les âmes viles. Tout ce beau monde fut condamné à éplucher les haricots jusqu’à la fin de ses jours. Certains demandèrent à avoir plutôt la tête tranchée, mais cette grâce leur fut refusée.

Les Italiens rentrèrent chez eux, riant et devisant, se racontant tour à tour les aventures qu’ils avaient pourtant vécues ensemble, pour le simple plaisir de les entendre d’une autre bouche… Ces récits furent d’ailleurs repris dans le rapport de mission qui fut remis au grand Doge de la République de Venise, et lus lors d’une séance exceptionnelle du Concio. C’est de sa traduction que nous tirons les événements qui manquent au manuscrit français.

Les villageois voulurent élire Perceval grand échevin, mais celui-ci déclina leur offre. Le souvenir de sa mère était devenu si poignant qu’il décida de retourner chez lui, pour la rassurer sur son sort et la soutenir dans ses vieux jours. Il repartit donc sur son blanc destrier, tout environné d’acclamations qu’il entendait peu, à la recherche de la clairière de son enfance.

Un nouvel échevin fut élu au village (ou plutôt nommé par le grand feudataire du pays avec l’approbation des notables locaux…) Après quelque temps, il proposa d’utiliser ce vieux terrain plein de fougères qui ne servait à rien derrière l’église. On pourrait y bâtir un nouveau palais, car celui où il résidait était un peu étroit… et surtout on pourrait y loger les riches négociants de passage qui jusqu’alors boudaient le village ! C’était une pluie d’or assurée pour tout le monde ! Mais ce projet rencontra une vive hostilité parmi les villageois. Ils se souvenaient de la maladie qui avait emporté beaucoup d’entre eux : un palais c’était bien beau, mais il valait mieux garder les fougères…

– FIN –

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